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SMN : histoire d'une "usine intégrée"

L’usine métallurgique de Colombelles doit sa création à l’industriel allemand August Thyssen qui fonde en 1910 la Société des Hauts fourneaux de Caen. Les premières installations nécessaires à la transformation du minerai de fer provenant de Soumont-Saint-Quentin, site acquis en 1907, sortent de terre en 1912. Mais la Première Guerre mondiale entraîne la mise sous séquestre de l’usine et son intégration au groupe Schneider en 1916. Celui-ci entreprend la construction de fours à coke, de deux hauts fourneaux, de cinq fours Martin, de quatre cornues Thomas. D’importantes difficultés financières contraignent au dépôt de bilan. En 1924, une nouvelle entité voit le jour, la Société métallurgique de Normandie (SMN). La poursuite des aménagements et les activités de production sont stoppées par la Deuxième Guerre mondiale. Particulièrement touchée par les combats, l’usine renaît de ses cendres pour voir sa production atteindre 958 300 tonnes d’acier en 1974 ; elle emploie alors 6 400 salariés.

Des ateliers d'acier

Les ateliers de la SMN, qui s’étendent sur 220 hectares de terrain, sont dédiés à la production d’acier, commercialisée sous la forme de fil de fer en bobines, de treillis pour le béton armé ou encore de « ronce léopard ».

Le minerai de fer de Soumont-Saint-Quentin est d’abord aggloméré avec du charbon qui est importé d’Angleterre via le bassin portuaire à usage privé d’Hérouville et cuit dans les fours à coke. Dans chacun des trois hauts fourneaux, il se transforme en fonte. Celle-ci est traitée dans les aciéries Martin ou Thomas, plus tardivement au sein de l’aciérie à oxygène, pour donner de l’acier liquide. Fondu dans des lingotières, l’acier est dirigé vers les ateliers de laminage (blooming, trains de 900, 300 ou encore de 450, trains à petits fers, trains à fil). Il est écrasé entre les cylindres des machines pour en réduire la section et lui donner forme. Au sein de la tréfilerie, de la pointerie ou de l’atelier des ronces, s’élabore un produit fini.

Chronique d'une fermeture annoncée

La crise de l’acier qui sévit à partir de 1975, la nationalisation de la filière sidérurgique française et le rattachement de la SMN à Unimétal en 1984 provoquent d’importants bouleversements. Les lignes de fabrication sont réorientées vers une production de moyenne et basse gammes, entraînant en 1989 l’abandon du minerai grillé de Soumont-Saint-Quentin au profit du minerai d’hématite. Mais cette conversion ne permet pas de préserver l’usine, dont la fermeture est programmée dès 1991.

L’Inventaire général, pionnier dans l’étude du patrimoine industriel, engage une opération d’urgence en 1993. Une équipe, formée par un chercheur et deux photographes, entreprend de fixer l’image des ateliers de fabrication et des savoir-faire propres au monde de la métallurgie. Plus de 300 photographies sont issues de cet ultime reportage.

La dernière coulée est réalisée le 5 novembre 1993. Les départs de l’aciérie à oxygène pour la Chine et du train à fil pour la Nièvre marquent la fin d’une époque. La SMN ne laisse derrière elle que de rares témoins d’un passé glorieux : réfrigérant et cité ouvrière du Plateau, qui aujourd’hui encore s’imposent dans le paysage de l’agglomération caennaise.